mardi 28 juillet 2009

Une ile en deux lettres


Pendant ces vacances, je suis donc allée camper, non pas à Belle-île-en-mer (j'en rêvais pourtant) mais à l'Ile de Ré, plus au sud, moins de risque d'intempéries.

Premier vrai camping.

Petite, j'avais l'habitude de dresser une petite tente dans le jardin de mes parents, mais ça ne compte pas. Il m'est arrivé, par la suite, de camper une nuit ici ou là, mais trois fois ou quatre fois peut-être dans ma très longue vie, ça ne compte pas.

Je n'en gardais pas un souvenir impérissable : trop peu de place, trop près du sol (toujours trop dur), les courbatures qui accompagnent inévitablement ces nuits mouvementées, non pas d'avoir trop embrassé, les sacs de couchage trop étroits, trop chauds ou trop froids. La torture de devoir sortir dans le noir, sous la pluie, plusieurs fois dans la nuit, pour faire pipi, en ayant peur de croiser un fou en chemin ou celle de se retenir toute la nuit et donc de ne pas dormir. Le froid qui réveille au petit matin ou le soleil qui vous écrase dès ses premiers rayons. La pluie qui goutte sur vos pieds gelés, parce que les vieilles tentes ne sont jamais imperméables.

Je réussis pourtant à me laisser convaincre: trois nuits sur une île.

Malgré toutes mes appréhensions, ce fut un rêve: la mer à dix encablures de notre tente, le bruit des vagues qui nous berçait nuit et jour, le bonheur indescriptible de se réveiller au cœur de la nature, de se lever tôt au petit matin, le monde encore endormi sauf quelques promeneurs fous comme moi, venus voir la mer alors qu'elle est encore vierge de toute trace humaine et de plus fous encore, venus prendre leur premier bain.

Une étrange connivence se crée entre ces rares promeneurs, qui sont heureux de partager ce moment précieux entre tous. Ces mêmes oiseaux qui plus tard, ne vous adresseront plus un regard, le soleil sera alors haut dans le ciel, l'air saturé des cris d'enfants, le sol de tous les campeurs enfin éveillés. Vous n'existez plus, l'ignorance prévaut, chacun essayant de préserver, coûte que coûte, un territoire privé.

Après cette promenade matinale, je rentrais dans la tente, transportée d'énergie, de bonheur et n'avais qu'une hâte, emmener mon fiancé, tout endormi, endolori, voir cette mer, ce sable, ce ciel, ce soleil. Conciliant, il m'écoutait lui rapporter les dernières nouvelles du monde ou plutôt, les premières. Il se réveillait doucement, redevenue câline sous ces airs marins, je me blottissais contre lui. Heureux, il se laissait porter vers le jour.

Petits déjeuner à même le sol, protégé par une simple cape de pluie, le sable nous avait envahit, le pain crissait sous nos dents, quelques grains s'étaient glissés dans sa mie. Un simple réchaud à gaz, une popote en aluminium dans laquelle nous faisions chauffer l'eau et laissions infuser le thé aux amandes (divin). Nous en perdions des quantité astronomiques, chaque fois que nous en voulions en verser dans nos tasses en plastique rouge. Il refroidissait à vive allure. Point de beurre, point de confiture, ni de miel, il fallait aller au plus simple: pâte à tartiner au chocolat, un régal d'autant plus précieux que rare, très rare. Désormais, partie prenante du rituel du petit-déjeuner sous la tente.

Puis, venaient les ballades à pieds et à vélo surtout, les bains de mer, la découverte d'une peur insoupçonnée, celles des vagues trop hautes. Mon cœur battais la chamade, l'estomac se serrait. Une vague géante arrivait, je tenais la main de mon fiancé, me reposais entièrement sur lui. Je lui découvris une force insoupçonné, une assurance royale, une intrépidité enfantine.

Une pluie torrentielle s'abattit sur l'île, la veille de notre départ. Nous avions peur que l'eau n'emporte tout sur son passage. Notre voisin protégeait sa tente comme il pouvait, il creusait des rigoles dans le sable, pour contenir l'eau hors de ses frontières. Nous l'imitâmes.

Le vent se déchaîna alors que nous étions dans le village de la Couarde, sur la place derrière l'église, en train de siroter le meilleur Mojito du monde, les serveurs n'en sont pas peu fiers, ils ont raison, c'est un délice: ce qu'il faut de citron vert, de menthe, de sucre, de glace, de limonade ou d'eau gazeuse et d'agostura, que j'aime les Mojitos-cigarettes!

Nous dégustions des moules-frites (décevantes) dans un restaurant près du camping, quand, à cet instant précis, les éléments se déchainèrent: le vent soufflait plus fort encore, soudain la pluie: des trombes d'eau s'abattirent sur le sol, submergé par les flots. Nous regardions ce spectacle d'un œil mi-inquiet, mi-amusé: nous étions à l'abri. Nous attendions. L'averse ne faiblissait pas. Nous avions terminé notre plat, bu notre vin, payé l'addition. Nous attendions, que la pluie se calme. Rien. Elle s'arrêta un instant. Nous nous levâmes, hésitâmes, mais elle recommença de plus belle. Nous nous rassîmes. Nous attendions. Un torrent d'eau se déversait sur l'île. Nous attendions. Nous prîmes un dessert pour patienter un peu, mais surtout pour mettre un peu de baume sur nos âmes épleurées. Soudain, comme nous terminions nos crèmes brûlées, la pluie cessa.

Nous rentrâmes, tout était sec. Une dernière cigarette.

Le lendemain nous partions :cap vers le sud avec escale à Bordeaux.



Photographie:

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